Un statut presse pour s'opposer aux dérives du " droit à l'image"

Un statut presse pour s'opposer aux dérives du " droit à l'image"

Vie privée et  droit à l'image

Deux principes de droit s'affrontent, d'une part la liberté de la presse qui s'exerce notamment à travers la diffusion des images, et d'autre part le respect des droits de la personnalité (vie privée, " droit à l'image"). 

La protection accordée à la personne photographiée s'apparente trop souvent à une censure du droit à l'information notamment par des condamnations  non justifiées au vu de l'appréciation réelle du préjudice subi.


Comment peut-on s'opposer dans l'Union Européenne à la dérive du " droit à l'image" ?

La solution réside dans l'énoncé de l'article 10 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, qui dispose  :

1 - Toute personne a le droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorité publique et sans considération de frontière.

2 - L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi qui constituent des mesures nécessaires dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour en garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire.

Ce texte consacre le droit à la liberté d'expression comme un droit absolu. En effet, ce n'est pas seulement la liberté de communication des idées et des opinions, mais également la liberté de communication des informations (droit du journaliste de les transmettre, et droit du public à les recevoir) qui est consacrée, comme un exercice nécessaire à la fonction de citoyen dans une société démocratique.

Quelles images peuvent être diffusées dans l'UE par le photographe ?
 
Les hypothèses suivantes excluent une image qui porterait atteinte par son contenu à la personne photographiée, c'est-à-dire réalisée dans un contexte visuel désagréable, ou qui serait accompagnée d'une légende ou d'un article désobligeant dont seul le directeur de la publication est en principe responsable.
 
S'agissant d'une image représentant une personne ou un groupe (anonymes) prise dans un lieu public avec un lien direct avec un événement d'actualité, elle est en principe autorisée. Exemples : une personne manifestant seule devant une ambassade, un ou des spectateurs dans un stade, un participant à un colloque...
 
S'agissant d'une image d'un groupe de personnes (anonymes) prise dans un lieu public sans lien direct avec l'actualité, pour être diffusée sans contestation, elle ne doit individualiser aucune des personnes représentées ; elle doit pouvoir traduire une information (vue d'atmosphère, d'ambiance...). 

Exemple : une photographie prise lors des courses hippiques dans un hippodrome, avec en gros plan les visages des joueurs regardant les résultats s'afficher sur les téléviseurs. Le TGI de Paris a rejeté les demandes de condamnation réclamées par les personnes photographiées, et a estimé que subordonner la diffusion de l'image prise dans un lieu public au consentement de chacune des personnes photographiées, aboutirait à prohiber tous documents d'information.
 
S'agissant d'une image représentant une seule personne voir deux dans un lieu public, sans lien avec l'actualité. Bien qu'il puisse s'agir également d'un document d'information et que le visage puisse parfaitement reconnaissable (comme dans l'exemple précédent), cette image est considérée comme une individualisation automatique des personnes représentées. Le Tribunal estime alors que l'atteinte au droit à l'image est constituée.
 
S'agissant d'une image d'un personnage public, prise dans un lieu public, sa diffusion n'est autorisée que si elle est relatives à des activités publiques. Or, la frontière entre les événements de la vie privée et de la vie publique est parfois très floue ; à ce jour, l'interprétation des tribunaux va souvent dans le sens de la protection qui est réclamée par les sujets photographiés 

Exemple : la publication de la photo du corps d'une personnalité, assassiné et gisant sur la voie publique, a été interdite par une décision de justice à la demande de la famille, sur le fondement de l'atteinte à l'intimité de la vie privée. La Cour a toutefois limité cette interdiction à la période de deuil.